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OBLOMOFF.

espiègle qui gonflerait les siennes exprès ne réussirait point à s’en faire de pareilles.

La bonne attendait son réveil. Elle commence à lui fourrer non sans peine ses petits bas ; il ne se laisse pas habiller, il fait des niches, il bat des jambes ; la bonne cherche à attraper ses petons, et tous les deux se pâment de rire.

Enfin elle a réussi à le mettre debout ; elle le lave, peigne sa petite tête et le conduit à sa mère. En revoyant sa mère morte depuis longtemps, Oblomoff tressaillit de joie même en rêve, par l’effet de son grand amour pour elle : chez lui, chez l’homme endormi, coulèrent lentement entre les cils et s’arrêtèrent immobiles deux chaudes larmes.

La mère le couvrit de baisers passionnés, ensuite elle l’examina d’un regard avide, inquiet, pour voir s’il n’avait point les yeux troubles ; elle lui demanda s’il n’avait pas mal quelque part, s’enquit près de la bonne s’il avait dormi paisiblement, s’il ne s’était point réveillé la nuit, s’il n’avait pas été agité par un rêve, s’il n’avait pas eu trop chaud : puis elle le prit par la main et le fit approcher de l’image.

Là, se mettant à genoux et l’entourant d’un bras, elle lui soufflait les paroles de la prière. L’enfant distrait les répétait en regardant par la croisée, qui laissait pénétrer dans la chambre la fraîche odeur des lilas.