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OBLOMOFF.

maintenir entier et inaltérable comme le feu de Vesta. C’est ainsi que la chose se pratiqua sous les aïeux et les pères, ainsi qu’elle se fit au temps du père d’Élie ; ainsi peut-être se fait-elle encore de notre temps à Oblomofka.

De quoi pouvaient-ils donc se préoccuper, à quoi rêver, de quoi s’émouvoir ? qu’avaient-ils à apprendre, quel but à atteindre ? Ils n’avaient besoin de rien.

Pareille à une rivière paisible, la vie coulait à leurs pieds ; ils n’avaient qu’à rester tranquilles sur le bord de cette rivière et à observer les phénomènes inévitables, qui tour à tour, sans être évoqués, apparaissaient devant chacun d’eux.

L’imagination d’Élie endormi commença aussi à lui retracer tour à tour, comme des tableaux vivants, d’abord les trois principaux actes de la vie, qui s’étaient joués, aussi bien dans sa propre famille, que chez les parents et les amis : la naissance, le mariage et l’enterrement.

Ensuite se déroula une série bariolée de scènes gaies ou tristes : les baptêmes, les fêtes de chacun des membres, les fêtes de famille, le dernier jour gras avant et le premier après chaque carême, les repas bruyants, les réunions de parents, les discours, les félicitations, les larmes et les sourires officiels. Tout cela s’exécutait avec précision, majesté, solennité.