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OBLOMOFF.

Lui vient-il la fantaisie de sauter en hiver dans le vestibule, ou d’ouvrir un vasistas, nouveaux cris :

— Aïe, où ? est-ce possible ? Ne cours point, ne va pas, n’ouvre pas ; tu vas te faire du mal, te refroidir…

Et Ilioucha restait tristement à la maison, soigné comme une fleur exotique dans une serre, et, comme une fleur mise sous cloche, il grandissait lentement et sans vigueur. Ses forces, qui cherchaient à se produire au dehors, étaient refoulées en dedans et baissaient et s’étiolaient.

Quelquefois il se réveille si alerte, si frais, si gai ! il sent que quelque chose joue et bouillonne en lui comme si un diablotin s’y était établi, qui le taquine et l’invite tantôt à grimper sur le toit, tantôt à monter à poil le rouan vineux et à s’échapper sur lui dans les prés où l’on fait les foins, ou à rester à cheval sur l’enclos, ou à agacer les chiens du village.

Tout à coup l’envie lui vient de traverser le village en courant, ensuite de s’échapper par les champs, la cavée, le bocage de bouleaux, et en trois bonds de se jeter au fond du ravin, ou de provoquer les petits gars pour jouer aux boules de neige ; en un mot d’essayer ses forces.

Le diablotin l’excite : il se retient, se retient, enfin la patience lui échappe, et nu-tête, en plein hiver, il bondit de l’escalier dans la cour, de là hors de la