Page:Gorki - Ma Vie d’enfant.djvu/258

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dans du carton des masques qu’il modelait, avec un nez, des yeux et une bouche ; il collait sur le haut du front des étoupes en guise de cheveux et s’en allait ensuite avec l’oncle Jacob hisser ces horreurs aux fenêtres des maisons. Naturellement, les gens effrayés poussaient des clameurs atroces. La nuit, les deux farceurs s’enveloppaient dans un drap et se promenaient dans cet accoutrement. Ils épouvantèrent le pope qui se précipita vers la guérite du sergent de ville ; mais ce dernier, prenant peur lui aussi, se mit à appeler au secours. Jacob et Maxime mystifièrent ainsi à peu près toute la ville et il n’y avait pas moyen de les faire revenir à la raison. Je leur disais : « Cessez-donc ces mauvaises plaisanteries ! » Varioucha grondait aussi, mais ils ne voulaient rien entendre. Maxime riait : « C’est trop amusant de voir les gens s’effrayer pour un rien et détaler à toutes jambes ! » disait-il.

» Il faillit payer de sa vie ces divertissements. L’oncle Mikhaïl est rancunier et susceptible, tout le portrait de grand-père : il résolut de faire périr ton père. Au commencement de l’hiver, Maxime, tes oncles et un diacre, déposé depuis pour avoir assommé un cocher de fiacre, revenaient tous quatre d’une maison voisine où ils avaient passé la veillée. Ils traversèrent la rue des Postillons et décidèrent Maxime à les accompagner à l’étang Dioukof, soi-disant pour y faire des glissades, mais une fois là, ils le poussèrent dans un trou creusé dans la glace… je t’ai déjà raconté la chose !

— Pourquoi les oncles sont-ils si méchants ?

— Ils ne sont pas méchants ! expliqua tranquillement