Page:Gorki - Ma Vie d’enfant.djvu/292

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n’apprenais pas l’histoire sainte ; à ces paroles il rajusta sa calotte et s’informa :

— Comment cela se fait-il ? Il faudra que tu l’étudies ! Mais peut-être sais-tu quand même quelque chose ; tu as probablement entendu des récits de miracles ? Tu connais les psaumes ? C’est très bien ! Et les prières ? Eh bien, tu vois ! Et tu connais aussi la vie des saints ? En vers ? Mais tu es un vrai savant !

Notre pope accourut rouge et haletant et l’évêque lui donna sa bénédiction ; mais lorsque le professeur voulut parler de moi, l’évêque leva la main et l’interrompit :

— Un instant, permettez… Voyons, récite-nous l’histoire d’Alexis, le saint homme de Dieu…

— C’est une belle poésie, n’est-ce pas, mon ami ! remarqua-t-il, profitant d’un instant où je m’interrompis pour avoir oublié un vers. — Tu en connais d’autres ? Sur le roi David ?… Je suis tout oreilles !

Je voyais qu’il écoutait, en effet, et que les vers lui plaisaient. Il me laissa longuement débiter ma tirade, puis, tout à coup, m’arrêta et me questionna par petites phrases rapides :

— Tu as appris à lire dans les psaumes ? Qui est-ce qui t’a appris ? Ton grand-père ? C’est un brave homme, n’est-ce pas ? Il est méchant ! Est-ce possible ? Et tu fais beaucoup de sottises ?

Je me troublai, mais je répondis par l’affirmative. Le maître et le pope confirmèrent mon aveu à grand renfort de paroles et l’évêque les écouta, les yeux baissés, en soupirant.

— Tu entends ce que l’on dit de toi. Allons, viens ici…