Page:Goudeau — Dix ans de bohème, 1888.djvu/155

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dat à la gloire reçoit des réponses évasives ou brutales, franches ou dilatoires :

— Des vers ! des vers ! dit l’un. Ah ! non, non, non, fussent-ils signés Homère !

— Faites de la prose, dit l’autre.

Un troisième toise l’importun :

— Comment ! vous, un inconnu, vous osez présenter un volume ? Faites-vous connaître d’abord.

— Mais, pense l’impétrant, si, pour se faire connaître, il faut déjà être connu, c’est une chose bien paradoxale, à moins d’imiter Lacenaire, et d’être connu comme assassin avant de se faire connaître comme poète.

D’autres, enfin, prennent le manuscrit, le gardent trois mois sans le lire, puis le rendent un beau matin comme ils l’ont pris.

À travers cette course folle, on va quémander chez les puissants, ou ceux que l’on croit tels, une lettre pour l’éditeur. C’est de la sorte que j’allai chez Barbey d’Aurévilly et chez Émile Zola.

Barbey d’Aurévilly déclara que j’étais un réaliste odieux, tandis qu’Émile Zola me taxa de romantisme exagéré.

J’en eus vite assez, du jugement des maîtres.