Page:Gouges - L Homme genereux.pdf/145

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

[à Madame de Valmont].

Je vois, Madame, que vous êtes inſtruite de tout.

Madame de Valmont.

Vous n’en doutez plus.

Le vieux Montalais.

C’eſt un homme, Monſieur, bien digne de votre eſtime. Ce matin, mon fils au déſeſpoir va s’engager, pour me procurer les moyens de me dérober aux pourſuites de mon créancier. Ce ſoldat venoit ſans doute chez nous pour s’aſſurer de lui : mais à peine s’eſt-il apperçu de nos malheurs, qu’il a rompu ſon engagement, & n’a jamais voulu reprendre l’argent qu’il nous avoit donné ; & cet argent, à ce qu’il nous a dit, étoit le produit d’un petit bien qui lui reſtoit de ſon patrimoine.

Le Comte à Madame de Valmont.

Eh bien, Madame, en comparant nos fortunes, trouvez-vous que le peu que j’ai fait, puiſſe égaler la généroſité de ce digne ſoldat ? Comment pouvoir jamais m’acquitter envers Marianne, envers ſon frere, de toute l’injuſtice que la calomnie m’a fait commettre à leur égard ?

Le jeune Montalais.

Ah, Monſieur, pouvez-vous vous faire des reproches ſi durs, vous à qui nous devons la liberté de mon pere ? Vous fûtes trompé. Eh, que eſt l’honnête homme qui peut s’aſſurer de ne l’être jamais ?

Marianne au Comte.

Ne ſommes-nous pas aſſez ſatisfaits, puiſque nous avons votre eſtime ?