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Le vieux Montalais.

Calme toi, ma chere Marianne. Me crois-tu inſenſible à tes douleurs, & que je puiſſe douter de la tendreſſe de mes enfans ? Hélas ! C’eſt ma ſeule conſolation dans l’état où je me vois réduit.

Le jeune Montalais.

Je me jetterai aux pieds de M. le Comte ; je lui avouerai qui je ſuis, je lui ferai connoître nos malheurs ; il eſt vertueux, généreux, humain, & ce ſera un plaiſir pour lui que de lui procurer le bonheur de faire une belle action.

Le vieux Montalais.

Ecoutez-moi, mon fils : j’ai plus d’expérience que vous ; M. le Comte eſt l’homme le plus reſpectable & le plus ſage ; mais il peut ſoupçonner votre conduite. M. la Fontaine, notre ami, jugea à propos de vous y faire entrer comme orphelin ; il avoit ſans doute ſes raiſons pour nos intérêts : le démentir aujourd’hui, ce ſeroit le compromettre. Vous vous perdriez, tout à fait dans l’eſprit de l’un & de l’autre. Je connois les Grands. Il n’eſt pas ſi facile de les faire revenir ſur le compte de quelqu’un, lorſqu’une fois ils en ont conçu une mauvaiſe opinion.

Le jeune Montalais.

Mais il m’eſtime.

Le vieux Montalais.

Et bientôt il te mépriſera.