Page:Gounod - Mémoires d’un artiste, 1896, 3e éd.djvu/44

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au séquestre, c’est-à-dire au cachot où je devais vivre de pain et d’eau jusqu’à ce que j’eusse achevé un énorme pensum, consistant en je ne sais combien de lignes à écrire : cinq cents ou mille ; une ineptie. Quand je me vis en prison, oh ! alors, je me fis l’effet d’un criminel. Les Euménides criant à Oreste : « Il a tué sa mère ! » ne devaient pas être plus effroyables que les pensées qui m’assaillirent au moment où l’on m’apporta le pain et l’eau du condamné. Je regardai mon morceau de pain et je fus pris d’un débordement de larmes. « Gredin, scélérat, infâme, me dis-je à moi-même, ce morceau de pain, c’est le travail de ta pauvre mère qui te le gagne ! ta mère qui va venir te voir à l’heure de la récréation et à qui on va répondre que tu es en prison, et elle va pleurer dans la rue en s’en revenant chez elle sans t’avoir vu ni embrassé ! Va, tu n’es qu’un misé-