Page:Gouraud - Dieu et patrie, paru dans La Croix, 1897.djvu/142

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C’était à ces choses que réfléchissait si anxieusement Michelle cette après-midi délicieuse de printemps, où elle buvait l’air tiède, assise aux Champs-Élysées, quand soudain une ombre s’était dressée devant elle, la forçant à revenir de son rêve torturant.

« Madame, dit le personnage, qui avait causé cette ombre dans le rayon du soleil, pardonnez-moi de vous déranger peut-être, mais je n’ai pu passer auprès de vous sans me rappeler à votre souvenir. Il semble que nous suivions en ce monde le même chemin, Madame, puisque voilà trois fois que nous nous rencontrons et dans des lieux bien différents. »

Michelle, qui revenait lentement à la réalité, restait hésitante et muette ; alors le nouveau venu continua :

« La première fois que j’eus l’honneur de vous voir, Madame, c’était dans la forêt Noire, aux ruines d’Eberstein ; la seconde à Berlin, la troisième… »

Elle l’interrompit :

« Monsieur Rozel ! vraiment, je suis contente de vous revoir ici, j’avais craint que vous ne fussiez parti pour ces terribles pays où vous vouliez aller en mission.

— J’espère toujours m’y rendre, Madame, grâce à Dieu ma vocation n’est pas changée ; mais je cède au désir de ma mère, qui ne peut se faire à l’idée de se séparer de moi.