Page:Gozlan - Balzac chez lui, 1863.djvu/208

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
192
BALZAC CHEZ LUI.

un lac, un véritable lac où l’on pouvait se promener en bateau. Cette expression, un lac de sang, cessait là d’être une métaphore. Il y avait lac, rives, vagues et barcarolles. Un lac d’une étrange beauté, comme a pu le rêver Néron, le grand poëte écarlate.

Nous attendions toujours sur la crête de notre mur. Le rideau allait se lever !

Une grille de fer s’ouvrit dans l’épaisseur du mur ; quatre hommes entrèrent aussitôt dans l’enceinte en traînant après eux, avec des cordes, le cheval mort, le héros de la fête, l’acteur principal que nous attendions avec des battements de cœur. Quand ils l’eurent rapidement dégagé de ces derniers liens sur la terre, pauvre créature qui en avait tant porté depuis sa naissance : et dans quel moment on l’en délivrait ! — pour lui donner la liberté de la mort — quand ils l’eurent laissé tout nu sur les pierres, ils s’éloignèrent et repoussèrent derrière eux la grille de fer. L’ouverture était jouée : l’action s’entamait.

Par toutes les grilles ouvertes au bout des rigoles, et sans doute par bien d’autres soupiraux masqués, apparurent aussitôt quelques rats attirés par l’immense régal. C’étaient des tirailleurs. Plusieurs, détachés de ce premier peloton, s’avancèrent sur la pointe des pattes jusqu’à quelques mètres de la bête,