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BALZAC CHEZ LUI.

montra du doigt, au fond de la cour, une chartreuse lézardée, délabrée, hermétiquement close. On eût dit une de ces maisons solitaires de la banlieue de Paris, qui attendent derrière leurs vitres chassieuses depuis un quart de siècle un locataire mythologique. Je sonnai sans espoir, convaincu que mon coup de sonnette, au milieu de toutes ces poussières, ne pouvait réveiller qu’une tribu de chauve-souris et de souris moins chauves.

« À ma grande surprise, la porte cria, elle cria fort, par exemple, et une honnête servante allemande parut sur le seuil. Elle était vivante ! Je répétai encore : — Madame de Bri… ?

« Une dame d’une quarantaine d’années, à la figure grasse, monacale et reposée, une sœur tourière sortit lentement de l’ombre bleue et tranquille du vestibule. C’était elle enfin ! c’était le dernier mot de l’énigme domiciliaire, c’était madame de Bri… ! Elle articula mon nom qu’elle enveloppa d’un sourire béat et m’ouvrit elle-même la porte du cabinet de M. de Balzac.

« J’entrai dans le sanctuaire.

« Mes regards se portèrent d’abord sur un buste colossal de l’auteur de la Comédie humaine, par David d’Angers : magnifique ouvrage du plus beau marbre,