Page:Gozlan - Le Dragon rouge, 1859.djvu/120

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
117
le dragon rouge.

marquis s’introduisit sans trop d’obstacle jusqu’au salon où on lui dit que venait d’entrer mademoiselle de Canilly ; celle-ci, pourtant, parut fort étonnée de cette visite à une heure si avancée de la nuit, et à peine remise du trouble qu’elle avait ressenti au spectacle.

Le marquis avait repris son air léger.

— Savez-vous ce qui m’amène chez vous ?

— Non, monsieur le marquis.

— Un secret.

— Je présume qu’il est peu grave, répondit Casimire, car vous auriez eu le temps de me le confier au spectacle.

— Il est très-grave, au contraire, mademoiselle, répliqua le marquis qui jeta les yeux vers la porte pour s’assurer qu’elle était fermée.

— S’il est grave, il n’est pas triste en tout cas. Vous me semblez d’une excessive gaîté.

— Écoutez-moi.

— Volontiers.

— Je suis très-riche, vous le savez.

— Oui, monsieur le marquis.

— Je veux partager ma fortune avec une femme que j’aime.

— C’est fort généreux, c’est de l’argent bien placé, si celle que vous aimez n’est pas riche, répliqua Casimire.

Si celle que vous aimez n’est pas riche, arrêta la volubilité fébrile du marquis.

Il comprit qu’il parlait à une jeune fille dont il n’éblouirait pas l’imagination avec des paillettes d’or, puisqu’elle était au moins aussi riche que lui.

— Ah ! il ne s’agit pas de générosité, se reprit-il un peu troublé, mais il s’agit de bonheur pour moi. Je veux me marier.

— En quoi mes conseils pourront-ils vous être utiles, monsieur le marquis, dans une telle affaire ?

— Ce n’est pas seulement de vos conseils que j’ai besoin, mais de votre consentement.