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le dragon rouge.

— Si c’était sur moi… mais… Oh ! si ce n’était que sur moi.

— C’est donc sur moi qu’ils ont parlé. Tu es bien émue, Marine ; que se passe-t-il ? Comme tu es agitée ! En vérité, tu m’effraies. Parle ! mais parle !

— Dis-moi, mignonne, reprit Marine en appuyant Casimire sur son sein comme autrefois lorsqu’elle voulait l’endormir, tu n’as remarqué les œillades noires ou bleues d’aucun de ces petits officiers qui abondent ici comme les sauterelles en été chez nous.

— Moi ! mais que dis-tu ?

— Tu n’as pas répondu à leur propos sucrés ?

— Mais, Marine…

— Ne te fâche donc pas, ma nourrissonne, histoire de causer ; reste là. Je t’ai chanté bien des chansons là où tu t’appuies ; encore une. Tu n’as pas répondu aux lettres de quelques petites moustaches. Il n’y aurait pas grand mal…

— Grand Dieu !

— Tu me le promets bien ?

— Qui est-ce qui a dit cela ?

— C’est cette bête, vois-tu, qu’on appelle tout le monde. Il n’y a pas jusqu’à notre cocher qui ne m’ait dit l’autre soir, en faisant un cent de piquet avec moi : Marine, sais-tu ? le cocher de monsieur tel m’a dit…

— Qu’est-ce que c’est que monsieur tel ? demanda Casimire.

— Ce cocher, reprit Marine, a dit à votre cocher, qui me l’a dit : — On dit que le mariage de votre jeune maîtresse avec le marquis de Courtenay a manqué uniquement parce que votre maîtresse a laissé tomber, l’autre jour, de sa ceinture, un billet doux qui aurait été ramassé par le marquis, et qui n’était pas pour le marquis.

— Oh ! infamie ! s’écria Casimire.

— Moi, j’ai abattu les cartes, et j’ai donné une paire de soufflets à notre cocher, en lui disant quinte majeure, quatre as, quatre rois.