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le dragon rouge.

— Pas encore, ma pauvre enfant. Mais tu me désoles, tu t’embrouilles comme un écheveau dans ce que tu as à me dire.

— Eh bien ! Marine, tu vas sortir par la petite porte de l’hôtel ; personne ne te verra. Tu iras à pied jusqu’à Saint-Maur : c’est au milieu du bois de Vincennes. Tu te présenteras au couvent des Bénédictins. Tu sonneras ; à toute heure ces bons pères ouvrent leur porte.

— Et puis, demanda Marine, que ferai-je ?

— Tu sais ce qui est arrivé au commandeur ?

À ce nom Marine se mit à fondre en larmes, après avoir retenu jusque-là la douleur qui enfin se faisait jour.

— Je sais, je sais…, murmura la bonne créature, que le pauvre commandeur a été tué. Ils l’ont tué ! lui, si bon ! Oh ! je ne comprends plus rien au bon Dieu !

— Marine ! Marine ! dit la marquise, le commandeur n’est pas mort. On a fait courir ce bruit, j’en ai la certitude, afin que les gens du roi ne le recherchent pas.

Marine regarda avidement la marquise afin de s’assurer qu’elle n’avait pas perdu la raison en lui parlant ainsi, à elle, Marine qui avait entendu ce qu’avaient dit le marquis au retour du duel et les témoins du marquis et ceux du commandeur, trop bien d’accord entre eux sur la manière dont le commandeur avait été tué par Raoul de Marescreux.

— Non ! te dis-je, il n’est pas mort. Il s’est retiré au couvent de Saint-Maur. C’est un secret, un grand secret que je te confie, un secret que j’ai arraché moi-même au marquis il n’y a qu’un instant.

— Pauvre petite ! pensa Marine, qui n’eut pas seulement le courage de paraître au moins surprise de cette nouvelle, dont elle savait la déplorable fausseté.

— Voilà ce que j’attends de toi, ma bonne Marine.

— Parle.

— Tu vas te rendre au couvent de Saint-Maur, et tu deman-