Page:Gréard - L’Éducation des femmes par les femmes, Hachette, 1889.djvu/113

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Autriche, l’avait fait enlever à Mme de Villette et prise chez elle. Mme de Maintenon n’a jamais oublié ce qu’elle eut à y souffrir. Mme de Neuillant était, au témoignage de Saint-Simon, « l’avarice même : elle ne put se résoudre à donner du pain à l’enfant sans en tirer quelques services ; elle la chargea donc de la clef de son grenier pour donner le foin et l’avoine par compte, et l’aller voir manger à ses chevaux. » Mme de Maintenon raconte elle-même qu’elle portait des sabots et qu’on ne lui donnait des souliers que lorsqu’il venait compagnie. Mme de Neuillant avait d’ailleurs son dessein : elle voulait, par les mauvais traitements et les humiliations, réduire la jeune fille à abjurer. Aucun moyen ne triomphant d’une obstination que la lutte ne faisait qu’affermir, et mécontente de s’être chargée d’une demoiselle sans bien, elle chercha bientôt à s’en défaire à quelque prix que ce fût. Françoise fut placée au couvent de Niort ; puis, — Mme de Neuillant se refusant à payer pour elle aucune pension, — renvoyée à Paris près de sa mère, qui la plaça comme elle put chez les Ursulines de la rue Saint-Jacques. À Niort on avait mis en œuvre toutes les séductions pour la ramener ; elle plaisait par son esprit et elle s’était attachée à une des sœurs du couvent, la mère Céleste, qui lui rendait sa tendresse. Les séductions, chez les Ursulines, « devinrent rudoiements, duretés et façons cruelles. » La supérieure était soutenue, excitée par Mme d’Aubigné, que le malheur avait aigrie. Épuisée par près de deux ans de résistance, mais non domptée, Françoise poussa vers Mme de Villette un cri de détresse, la suppliant d’employer son crédit et ses soins à la tirer du couvent. « Ah ! Madame et tante, s’écriait-elle,