Page:Gréard - L’Éducation des femmes par les femmes, Hachette, 1889.djvu/116

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1659), Mlle de Scudéry en traçait dans la Clélie. « Lyrianne — c’est le nom qu’elle lui donne — était grande et de belle taille, mais de cette grandeur qui n’épouvante point et qui sert seulement à la bonne mine. Elle avait le teint fort uni et fort beau, les cheveux d’un châtain clair et très agréable, le nez très bien fait, la bouche bien taillée, l’air noble, doux, enjoué et modeste ; et, pour rendre sa beauté plus parfaite et plus éclatante, elle avait les plus beaux yeux du monde. Ils étaient noirs, brillants, doux, passionnés et pleins d’esprit ; leur éclat avait je ne sais quoi qu’on ne saurait exprimer : la mélancolie douce y paraissait quelquefois avec tous les charmes qui la suivent presque toujours ; l’enjouement s’y faisait voir à son tour avec tous les attraits que la joie peut inspirer, et l’on peut assurer après sans mensonge que Lyrianne avait mille appas inévitables. Au reste son esprit était fait exprès pour sa beauté, c’est-à-dire qu’il était grand, agréable et bien tourné ; elle parlait juste et naturellement de bonne grâce et sans affectation : elle savait le monde et mille choses dont elle ne se souciait pas de faire vanité. Elle ne faisait pas la belle, quoiqu’elle le fût infiniment, de sorte que, joignant les charmes de sa vertu à ceux de sa beauté et de son esprit, on pouvait dire qu’elle méritait sa fortune. » Il était difficile d’apporter plus de séductions dans une société plus disposée à en abuser. Mme Scarron, se faisant un rempart de tout ce que la sagesse pouvait trouver d’aimables ressources, s’y maintint dans une mesure très étudiée et très attentive de gravité charmante, — irrésistible dès qu’elle se prêtait à la compagnie, mais ne prenant des fêtes et des entretiens que la part qu’elle en voulait prendre. «