Page:Gréard - L’Éducation des femmes par les femmes, Hachette, 1889.djvu/163

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nombre il n’y en ait pas d’un médiocre génie. » Mais chez toutes elle voulait que l’effort profitât à l’esprit. Même dans les exemples d’écriture, — elle en avait beaucoup tracé elle-même, — elle cherchait la pensée morale, le conseil utile ; elle ne permettait pas que l’intelligence de l’enfant portât sur le vide. Elle recommandait les explications simples, claires, bien à la portée suivant l’âge, et appuyées sur des exemples ; elle mettait ses maîtresses en garde contre le verbiage, se moquait de l’éloquence, poussait aux démonstrations succinctes et en donnait des modèles d’une solidité supérieure. En proscrivant les « écritures, » dont on avait abusé, elle n’avait pas entendu défendre que les demoiselles fussent exercées à rédiger des lettres ; mais elle ne tolérait aucun développement oiseux, et exigeait que la parole ne fût, selon le précepte de Fénelon, que le vêtement de la pensée. Vêtement d’un tissu singulièrement souple et nuancé, si l’on en juge par la correspondance de quelques-unes de ses élèves, Mme de Caylus, Mlles d’Aumale et Jeannette de Pincré, plus fidèles encore, il est vrai, à son exemple qu’à ses principes. Mais alors même que le talent n’y venait pas joindre ses grâces d’élection, quelle école pour l’esprit que ces habitudes de rectitude et de sobriété ! Si la méthode était plus exacte qu’attrayante pour des enfants, comme la sûreté en rachetait heureusement la sécheresse ! « Le principal pour bien écrire, disait Mme de Maintenon, est d’exprimer tout uniment ce qu’on pense : on ne trouve jamais l’esprit quand on le cherche. »

Mais où s’alimentera la pensée et comment l’expression destinée à la rendre se façonnera-t-elle ? Mme de Maintenon excellait à ouvrir à l’intelligence des demoiselles