Page:Gréard - L’Éducation des femmes par les femmes, Hachette, 1889.djvu/207

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à fait misanthrope, dont la misanthropie, comme de raison, vint échouer à une coquette qui s’en fit épouser, la marquise de Loc-Maria. Cette femme, dont la conduite exterieure n’avait rien de reprochable, point méchante, était fort avant dans le monde, d’une gourmandise distinguée et cherchant à plaire à bride abattue. »

Toutes ces disgrâces, vivement ressenties par Mme de Lambert, l’avaient rejetée sur elle-même. Elle n’avait jamais perdu le goût ni renoncé à l’habitude de lire et de méditer. Ses déboires, ses infortunes servaient de thème à ses réflexions : « Il n’y a, disait-elle, que le malheur qui forme ; j’ai de bonne heure senti le besoin que les femmes ont d’être raisonnables… » En écrivant à son fils et à sa fille, c’est à elle aussi qu’elle pensait ; si ses conseils ne devaient pas leur être aussi utiles qu’elle le souhaitait, elle prenait, « en les donnant, de nouveaux engagements pour travailler à son propre avancement dans la vertu. » Ne connût-on de son existence que ces soixante années de travail intérieur, d’action, de lutte, il serait difficile de lui refuser le mérite, qu’elle croit accessible à toutes les femmes, d’avoir développé en elle l’activité intellectuelle et morale et donné l’exemple de prendre rang à côté des hommes dans la vie.

II

Détachée par son âge et désintéressée par l’aisance qu’elle avait su se conserver de tout souci d’avenir, c’