Page:Gréard - L’Éducation des femmes par les femmes, Hachette, 1889.djvu/40

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qui plaisent dans la femme et en font une énigme. » Il était de complexion délicate, ce qui servit vraisemblablement à le rendre plus tard si attentif à la santé des enfants ; mais, de bonne heure, il annonça un cœur vaillant, un esprit vif, subtil et contenu. On raconte qu’un jour qu’il prenait l’air aux environs du château, le valet auquel il avait été remis en garde laissa échapper un propos qui lui parut manquer de justesse et qu’il releva. Le valet, piqué de l’insistance de l’enfant, le jeta à terre brutalement. Le jeune Fénelon, dans la crainte que sa mère, qui ne le quittait jamais d’ordinaire, ne renvoyât le coupable, se tut et attribua à un accident la blessure qu’il s’était faite.

Il resta jusqu’à douze ans sous cette tutelle de famille. Son précepteur, profondément imbu de la connaissance des lettres grecques et latines, se plaisait à le nourrir du plus pur miel de l’antiquité ; il était « en pleine possession de ses auteurs » lorsqu’il fut envoyé à l’Université de Cahors pour achever son cours d’humanités et prendre ses degrés. Averti de son zèle et de sa distinction, un de ses oncles, le marquis Antoine de Fénelon, le fît venir à Paris, au collège du Plessis, où, tout en terminant sa philosophie, il entreprit ses études théologiques. Telles étaient les promesses de talent qu’il faisait entrevoir, que, renouvelant l’épreuve à laquelle l’Hôtel de Rambouillet avait jadis soumis Bossuet, « on hasarda de le faire prêcher ; son sermon eut un succès extraordinaire » : il venait d’avoir quinze ans. Le marquis, homme de sens et de goût, de qui le grand Condé, son compagnon d’armes, disait « qu’il était également propre pour la conversation, pour la guerre et pour le cabinet, » ne vit dans ce succès qu’un danger. Prive