Page:Gréard - L’Éducation des femmes par les femmes, Hachette, 1889.djvu/84

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qui peuvent nous servir ; mais on n’est pas fâché de se montrer à elles par les meilleurs endroits ; et c’est justement à ces petites découvertes humaines qu’on peut attribuer le commencement de son élévation : ainsi personne ne saurait s’assurer entièrement qu’il ne s’est pas appelé lui-même. »

Ce qui est certain, c’est qu’aucun élève ne pouvait mieux répondre aux vœux de son précepteur. Le duc de Bourgogne était doué, au suprême degré, de cette sensibilité vive que Fénelon considérait comme le ressort de l’éducation ; et en même temps ce n’était pas, à beaucoup près, un de ces naturels accomplis pour lesquels l’éducation n’a rien à faire. On connaît le portrait qu’en a tracé Saint-Simon : « …Dur et colère jusqu’aux derniers emportements et jusque contre les choses inanimées ; impétueux avec fureur, incapable de souffrir la moindre résistance même des heures et des éléments sans entrer en des fougues à faire craindre que tout ne se rompît dans son corps ; opiniâtre à l’excès ; passionné pour tous les plaisirs et pour le jeu, où il ne pouvait supporter d’être vaincu ; souvent farouche, naturellement porté à la cruauté, barbare en raillerie, saisissant les ridicules avec une justesse qui assommait ; de la hauteur des cieux ne regardant les hommes que comme des atomes avec qui il n’avait aucune ressemblance, quels qu’ils fussent, si bien qu’à peine les princes ses frères lui paraissaient intermédiaires entre lui et le genre humain, quoiqu’on eût toujours affecté de les élever tous trois dans une égalité parfaite. »

C’est par l’intelligence que Fénelon parait avoir attaqué ce redoutable sujet ; et il y employa tous les moyens dont l’expérience et la réflexion l’avaient armé. « Ce