Page:Gréville - Suzanne Normis, roman d'un père, 1877.djvu/107

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
101
ROMAN D’UN PÈRE.

celui de M. de Lincy, et lui dire au juste ce que vous donnez en dot à Suzanne.

Cette conversation me laissa rêveur, et, tout en roulant d’un endroit à l’autre pour les formalités d’usage, je me demandai ce que j’allais donner en dot à Suzanne. Lui donner quelque chose ! Cette idée me paraissait bien extraordinaire. Est-ce que tout ce que j’avais n’était pas à elle ? Pour la première fois, j’allais séparer sa vie de ma vie, son bien de ma propriété… C’était bien étrange, et, je l’avoue, bien pénible.

Mon notaire m’attendait, avec de gros dossiers sur sa table. Il me fit asseoir en face de lui, tout près, à portée de ses yeux noirs et myopes, et se lança aussitôt au cœur de la question.

— Mademoiselle Normis, me dit-il, possède deux cent mille francs du chef de sa mère, ce qui fait de dix à douze mille livres de rente, c’est un fort joli denier ; que désirez-vous y joindre ?

— Ma foi, répondis-je honteux, je n’en sais rien du tout. C’est à vous de me dire ces choses-là. Combien donne-t-on à sa fille en la mariant quand on a plus d’argent qu’on n’en peut dépenser ?

— Cela dépend du gendre qu’on prend, ré-