Page:Gréville - Suzanne Normis, roman d'un père, 1877.djvu/167

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
161
ROMAN D’UN PÈRE.

XXIV


Le doute n’était plus possible ; malgré la générosité qui poussait Suzanne à me cacher la situation, ma fille était malheureuse dans son intérieur. Malheureuse ! Et moi, qui avais cru si bien faire en la mariant de bonne heure, afin de ne pas la laisser orpheline, non-seulement je n’étais pas mort, mais il me semblait aller beaucoup mieux ! Ne sachant à qui m’en prendre, dans ma colère, j’allai voir le docteur. Il se trouvait précisément chez lui.

— C’est une indignité, docteur, lui dis-je en entrant : vous m’avez trompé !

— Asseyez-vous donc, mon ami, répondit-il sans se troubler. En quoi vous ai-je trompé ?

— Je me porte comme le pont Neuf ! Et vous qui m’avez fait marier ma fille sous prétexte que j’étais dangereusement malade…

L’excellent homme me rit au nez sans cérémonie, puis reprit avec une douce gaieté :