Jamais Suzanne n’avait parlé de notre fortune, je la croyais au courant de nos revenus.
— Mais oui ! lui dis-je, ne le vois-tu pas, d’après mon genre de vie ?
— Ce n’est pas cela que je veux dire, reprit-elle : je m’exprime mal, sans doute. As-tu une grande fortune personnelle, indépendante de… de ma dot ? ajouta-t-elle plus bas.
Je pressentis un nouveau nœud dans notre existence, et je répondis nettement :
— Je t’ai assuré quinze mille francs de revenu, à cinq, qui font trois cent mille francs de capital : le capital t’appartient ; les revenus sont indivis entre toi et ton mari. De plus, tu tiens de ta mère environ deux cent mille francs.
Suzanne baissa la tête et parut calculer.
— Vingt-cinq mille francs, dit-elle, c’est beaucoup…
— Non, quand on a un loyer et un train de maison considérables, — mais tu n’as pas de voitures… M. de Lincy doit avoir au moins autant ?
Ma fille ne répondit pas à cette dernière question.
— Et toi, père, reprit-elle, es-tu riche ?
— J’ai encore à moi environ quarante-cinq