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SUZANNE NORMIS.

courant des chagrins domestiques de Suzanne, et, depuis, les bruits de ville lui en avaient appris beaucoup plus long que je n’en savais moi-même. Un jour que nous revenions du tir par le plus long chemin, je lui racontai donc comment j’avais enlevé Suzanne ; il m’interrompit :

— Ce lâche l’avait frappée ? dit-il avec une expression de rage qui me saisit.

— Qui vous l a dit ?

— Ce n’est un secret pour personne ; je suppose que les domestiques auront parlé.

— M’a-t-on blâmé ? fis-je, curieux soudain de savoir comment nous avions été jugés.

— Il n’y a eu qu’une voix pour vous louer. Lincy était universellement connu pour ce qu’il est. Mais vous avez agi très-sagement en vivant à l’écart comme vous l’avez fait, car il a remué ciel et terre pour vous retrouver, et je suis persuadé qu’il n’y a pas renoncé.

— Qu’il y vienne ! dis-je, comme je l’avais dit deux ans auparavant. S’il veut l’avoir, il faudra que je sois mort.

Vernex me serra la main avec une force extraordinaire, et la conversation tomba.

Depuis ce moment, un bien-être indicible s’étendit sur notre paisible demeure. Nos causeries,