Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 1.djvu/194

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d’entrave. L’opulence était également rentrée à Samarie, grâce au butin provenant de guerres heureuses, grâce aussi, apparemment, à la renaissance du commerce. Non seulement le roi, mais encore les nobles et les riches menaient grand train et prodiguaient la dépense. Jéroboam avait un palais d’été et un palais d’hiver ; les maisons en pierre de taille ornées d’ivoire et les lits d’ivoire étaient devenus choses communes. À ne considérer que la force des deux moitiés de l’ancien royaume de Salomon, l’on aurait pu s’abandonner à l’illusion que le règne de ce roi durait encore et qu’aucun changement n’était survenu, si ce n’est qu’il régnait deux princes au lien d’un seul, que le schisme n’avait pas eu lieu ou que les blessures en étaient guéries. Jéroboam et Osias semblent avoir vécu en paix l’un avec l’autre. Il est probable aussi qu’on vit à cette époque de nombreux visiteurs monter au temple de Jérusalem ; mais ce fut le dernier reflet d’un âge de prospérité. Des vices intérieurs, engendrés par le bien-être et qui se manifestèrent avec plus d’acuité dans le royaume d’Israël que dans celui de Juda, ne tardèrent pas à fermer l’ère des jours heureux et à accélérer la décadence.

Le culte du taureau subsistait toujours parmi les dix tribus à Béthel et à Dan. La première de ces villes fut même érigée en résidence, et élevée au rang de métropole religieuse, sous l’autorité d’une sorte de grand pontife, du nom d’Amazias, homme très jaloux des privilèges de son ministère et qui, à la différence des prêtres de Juda, possédait de riches prébendes. Comme s’il n’eût pas suffi. de l’idolâtrie ancienne ou qu’elle eût cessé de satisfaire les esprits, ou encore que la lasciveté née de l’opulence eût fait naître le besoin d’une autre religion, les rites impurs de Baal et les désordres de celui d’Astarté retrouvèrent faveur. On ne laisse pas d’être surpris de voir le culte proscrit avec tant de zèle et non sans effusion de sang par Jéhu reprendre vogue sous son petit-fils. La restauration de l’idolâtrie eut pour conséquences naturelles le dérèglement des mœurs, la luxure et la dépravation. L’on n’eut plus de pensée qu’à s’enrichir, afin de pouvoir assouvir ses passions. Les richesse livrèrent à l’usure et poussèrent l’âpreté jusqu’à vendre comme esclaves leurs débiteurs insolvables ou leurs enfants. C’est sur les grains surtout que s’exerçaient leurs spéculations.