Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 1.djvu/211

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l’âme et la moelle de la nation et à laquelle ils vouèrent sans réserve leur esprit et leur cœur. Ces pauvres devaient servir d’exemple au peuple. Le cercle de lumière qui émanait de ce grand prophète répandit autour de lui la chaleur et la clarté ; sous sa bienfaisante influence, les germes cachés au fond de la loi sinaïque apparurent au jour et leur éclosion assura la domination intellectuelle du peuple de Dieu. Isaïe devint ainsi, comme le fut Samuel et bien plus qu’Élie, le point de départ d’une évolution capitale dans l’histoire du développement intérieur d’Israël. Mais son regard prophétique ne s’attachait pas qu’à son peuple et à son pays ; il errait encore au delà des frontières et se portait surtout sur les deux grands États conquérants, l’Égypte et l’Assyrie, de plus en plus redoutables et pour Israël et pour Juda.

Le lien fraternel qui avait uni les deux royaumes sous les règnes d’Osias et de Joathan se rompit à la mort de ce dernier, et la discorde rentra dans les cœurs. A quel sujet ? On l’ignore. Achaz, le nouveau roi de Juda (739-725), était un esprit faible, aux conceptions confuses, et qui n’avait aucune des qualités requises par les dangers de la situation. Sous son règne se nouèrent des complications politiques dont les conséquences se firent sentir au loin et qui devaient l’enlacer lui-même dans des difficultés inextricables. Peu après son avènement surgit une question de haute portée, entrerait-il à son tour dans l’alliance des royaumes de Samarie et de Syrie ? Ces deux pays se voyaient dans la nécessité de s’unir étroitement pour faire face au double danger qui les menaçait, d’une part, du côté de l’Égypte, redevenue puissante sous son roi Sabacus, de l’autre, du côté de l’Assyrie, également gouvernée par un prince conquérant, Téglat-Phalazar. Ce monarque plein d’énergie, qui non seulement restaura son royaume désorganisé, mais encore le consolida et l’agrandit, venait de détruire diverses places fortes en Mésopotamie et tournait ses armes contre les pays du Liban. De là, entre Rezin et Phacée une alliance offensive et défensive, à laquelle ils s’efforcèrent de faire adhérer Achaz. Celui-ci ayant refusé, les deux rois, ligués, parait-il, avec d’autres peuples, lui déclarèrent la guerre.

La maison de David, à cette nouvelle, entra dans une grande frayeur. Aveuglé par l’effroi, Achaz dépêcha secrètement une