Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 1.djvu/283

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être un esclave chargé de mépris et néanmoins un modèle sublime.

Qui fut ce prophète, à la fois grand poète et profond penseur ? On l’ignore ; ni lui-même ni d’autres ne nous font rien connaître de sa vie. Les compilateurs ont trouvé de l’analogie entre l’ampleur et l’élévation de son style et les qualités de celui d’Isaïe l’ancien ; ils ont, pour cette raison, ajouté ses discours à ceux du fils d’Amoz et réuni les uns et les autres en un seul livre. Aucun ne sut mieux que lui réconforter la dolente communauté de Juda ; aucun ne mit plus d’âme à relever les courages défaillants. Sa parole agit comme le baume sur la plaie ou comme un vent léger sur un front brûlant. Consolez, consolez mon peuple, fait-il en commençant,

Consolez, consolez mon peuple, dit votre Dieu,
Parlez au cœur de Jérusalem, et annoncez-lui
Que le temps de ses infortunes est accompli,
Que son iniquité est pardonnée.
Et qu’elle a reçu de Jéhovah le double pour tous ses châtiments.

Cette communauté, dont la souffrance va jusqu’à l’épuisement et qui a soif de consolation, le prophète la représente comme une mère qui, pour ses fautes, s’est vu repousser et priver de ses enfants, mais que son époux n’a pas cessé de chérir comme la bien-aimée de sa jeunesse. Cette délaissée, il l’appelle Jérusalem, du nom qui résume pour lui toute émotion et toute tendresse : Courage, crie-t-il à cette mère abandonnée,

Réveille-toi, debout, Jérusalem,
Qui as reçu de la main de Dieu et vidé le calice du vertige.
Elle n’a personne pour la diriger, de tous les enfants
Qu’elle a enfantés ;
Nul ne la prend par la main, de tous les fils
Qu’elle a élevés !
……………………………
Ô pauvre, battue par la tempête, dont personne n’a pitié,
Je garnirai de rubis les pierres de ton seuil,