Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 2.djvu/144

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à l’idée d’avoir été privé, par les événements de la Judée, des fonctions de grand prêtre qui lui revenaient de droit. Pendant les troubles de la Judée, quand Alkimos fut nommé pontife au mépris des droits de la famille légitime, Onias conçut le dessein de remplacer le temple profané de Jérusalem en érigeant en Égypte un sanctuaire dont il serait, de droit, le grand prêtre. Était-cela piété ou l’ambition qui l’animait ? Les sentiments intimes échappent à l’histoire. Pour obtenir l’assentiment des Judéens, Onias invoqua une prophétie d’Isaïe qui devait s’accomplir par son œuvre (Isaïe, XIX, 19) : Un jour viendra où Jéhovah aura un autel dans la terre de Misraïm.

Onias communiqua son projet à Philométor, qui l’approuva, et, pour le récompenser de ses services, lui donna un district dans la contrée d’Héliopolis, à 180 stades au nord de Memphis, au milieu du pays de Goschen. Sur les ruines d’un temple païen, consacré à la divinité égyptienne Bubaste, dans la petite ville de Léontopolis, où l’on adorait jadis des animaux, Onias dressa le sanctuaire judaïque (154-152). Son aspect extérieur ne ressemblait pas tout à fait à celui du temple de Jérusalem : il avait la forme d’une tour et ses murailles étaient en briques. A l’intérieur, tous les vases sacrés rappelaient ceux du temple de Jérusalem, sauf le chandelier d’or à sept branches, qui était remplacé par un lustre d’or suspendu à une chaîne du même métal. Des prêtres et des lévites, qui avaient fui la persécution de Judée, accomplissaient les sacrifices et la liturgie dans ce temple d’Onias (Beth-Honio). Pour l’entretien du temple et des prêtres, le roi abandonna les revenus du territoire d’Héliopolis. Ce district, formant un petit État sacerdotal, prit le nom d’Onion. C’était un lien de plus entre les Judéens de l’Égypte. Si le temple d’Onias était pour ceux-ci le centre religieux où ils se rendaient en pèlerinage à l’époque des fêtes et où ils offraient leurs sacrifices, ils ne songèrent pourtant pas à rompre avec le sanctuaire de Jérusalem et à placer Beth-Honio au niveau ou plutôt au-dessus de ce dernier, comme avaient fait les Samaritains. Au contraire, ils honoraient Jérusalem comme la sainte métropole et ils considéraient son temple comme le séjour de la Divinité. Mais, grâce à la prophétie d’Isaïe, si merveilleusement réalisée, ils aimaient aussi leur sanctuaire et appelaient Héliopolis la ville de la justice (