Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 2.djvu/261

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résistance énergique. Sur quelques points éclatèrent des soulèvements partiels. En vain les modérés et le grand prêtre Joézer cherchèrent à calmer les esprits en expliquant au peuple que le cens n’entraînait ni asservissement, ni confiscation, et n’avait d’autre but que de contrôler la prestation de l’impôt. Le cens n’en resta pas moins odieux, au point que le nom même prit une signification déplaisante et servit à désigner toute amende pécuniaire (census, KENAS). Du reste, tout en cherchant à empêcher la révolte, les modérés eux-mêmes voyaient avec indignation les empiétements des Romains. Les hillélites, eux aussi, irrités de ces vexations, firent violence à leurs scrupules habituels en permettant de s’y soustraire par tous les moyens possibles. Telle était la haine inspirée par ce système oppressif, que tous ceux qui prenaient part à la perception des impôts, soit comme fermiers (mokhès), ou comme receveurs (gabbaï), furent déclarés infâmes, exclus de la bonne société, et que leur témoignage n’était pas reçu en justice. De fait, ceux-là seulement qui menaient une vie indévote, — soit par intérêt, soit par indifférence religieuse, — consentaient à accepter de pareilles fonctions ; si bien que les noms injurieux de publicain et de violateur de la Loi devinrent synonymes.

Un autre changement, dû au régime nouveau, eut lieu dans la rédaction des actes publics. Ces actes, même les lettres de divorce, datés jusqu’alors du règne des gouvernants judaïques, devaient l’être désormais du règne de l’empereur. Cette innovation déplut aussi aux zélateurs, qui blâmaient la modération pharisienne de se montrer, sur ce point, si tiède et si complaisante : Comment, écriaient-ils, souffrir qu’à cette formule : selon la loi de Moïse et d’Israël, on accole le nom de César, et que le nom révéré du grand prophète soit mis sur la même ligne que celui d’un prince païen !

Quirinius, toutefois, dut faire une concession au mécontentement populaire : il déposa le grand prêtre Joézer et le remplaça par Anan (de la famille de Seth), dont les cinq fils furent successivement grands prêtres. Peu de temps après le départ de Quirinius, Coponius, le procurateur de la Judée, fut rappelé et remplacé par Marcus Ambivius,