Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 2.djvu/299

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croix. Cette terrible situation dura plus d’un mois. Le gouverneur fit arrêter inopinément, dans leurs propres maisons, trente-huit membres du Grand Conseil ; on les traîna, chargés de chaînes, sur le théâtre, où ils furent battus de verges en présence de toute la populace (31 août 38). Même les femmes et les jeunes filles ne furent pas épargnées. Dès qu’on en apercevait une, on se jetait sur elle, on lui faisait manger de la viande de porc et, si elle résistait, on la soumettait à la plus cruelle torture. Ce n’était pas encore assez : Flaccus envoya un centurion avec des soldats pour envahir les maisons du Delta et s’assurer qu’elles ne renfermaient point d’armes. On ne respecta même pas, dans cette perquisition, les chambres des jeunes filles.

Ces vexations se prolongèrent jusqu’au delà de la mi-septembre. Un envoyé de l’empereur, arrivé à l’improviste, destitua Flaccus et l’emmena à Rome où on devait le traduire en justice, non pas toutefois à cause de ses violences contre les Judéens, mais simplement parce qu’il était haï de César. C’est pendant que ces malheureux, parqués dans le Delta, célébraient la fête des Tabernacles que leur parvint la nouvelle de la disgrâce de Flaccus. Leur persécuteur fut condamné au bannissement et, plus tard, mis à mort.

L’empereur seul aurait pu régler la question relative aux droits civils des Judéens ; mais il se trouvait alors en Germanie et dans les Gaules, où il se couvrait de lauriers imaginaires. A son retour à Rome (31 août 40), il conçut le projet extravagant de se faire adorer comme un demi-dieu, et ensuite comme un dieu complet, de faire construire des temples en son honneur et d’exiger qu’on rendit un culte à ses statues. A ce moment, les païens d’Alexandrie crurent avoir beau jeu contre les Judéens. Ils rétablirent aussitôt les images impériales dans leurs synagogues, espérant qu’ils se refuseraient à les adorer et s’attireraient ainsi la colère de l’empereur. Ce fut la cause de nouveaux conflits auxquels prit part le gouverneur de l’Égypte, désireux de gagner les bonnes grâces du maître. Il voulut contraindre les Judéens à adorer l’image impériale. Ceux-ci ayant invoqué l’autorité de leurs lois religieuses, il songea à en entraver l’observance et à interdire notamment le repos sabbatique. Quoi ! disait-il aux principaux d’entre eux, si des ennemis venaient à vous attaquer subitement,