Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 2.djvu/350

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temple, de sorte que ses regards pouvaient de cette hauteur plonger dans les parvis sacrés et surveiller les moindres mouvements du peuple. Les Judéens s’offusquèrent de cette atteinte portée aux privilèges du temple et firent à l’ouest du sanctuaire un mur assez haut pour en intercepter la vue. La chose déplut fort à Agrippa et au procurateur, qui donnèrent l’ordre de jeter bas la muraille. Il s’ensuivit une discussion violente ; enfin les deux parties, mieux avisées, en référèrent à l’empereur. Douze délégués, parmi lesquels le grand prêtre Ismaël et le trésorier Helcias, se rendirent à cet effet à Rome. Mais ce ne fut pas Néron, ce fut sa maîtresse, la belle Poppée (Poppæa Sabina) qui trancha le différend. Cette femme avait conçu, on ne sait trop comment, une prédilection marquée pour le judaïsme. Or, l’intrigue étant à la cour de Néron l’âme de toutes les affaires, les députés judaïtes mirent à profit cette heureuse circonstance pour gagner à leur cause le chef de l’État. La députation revint après avoir obtenu que le temple cesserait désormais de subir une injurieuse surveillance.

Quelques années plus tard, Poppée intervint une seconde fois en faveur de deux Judéens que le procurateur avait envoyés à Rome sous le coup d’une accusation criminelle, et qui étaient d’une piété si rigide qu’ils ne voulurent se nourrir que de fruits pendant leur séjour en prison, comme autrefois Daniel et ses compagnons. A la prière de Poppée, devenue alors impératrice, Néron leur rendit la liberté.

Festus étant mort, Néron lui donna pour successeur Albinus, qui pouvait passer pour juste et modéré en comparaison de ses devanciers et de ses successeurs. Avant l’arrivée d’Albinus, le grand prêtre Anan avait prétendu relever le sadducéisme à demi expirant et rétablir la juridiction criminelle dans son autorité première et selon les principes de cette secte. Anan forma en conséquence un tribunal qui traduisit à sa barre des innocents, les jugea et les condamna comme violateurs de la Loi. Les Pharisiens, indignés de l’existence de ce Sanhédrin illégal et de sa procédure arbitraire, sommèrent le roi Agrippa de déposer le grand prêtre.

Quelques-uns d’entre eux allèrent mémé à la rencontre du procurateur Albinus pour accuser Anan d’avoir empiété sur les