Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 2.djvu/52

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même des noms propres : Michaël, Gabriel, Raphaël, Uriel ou Suriel, Matatoron, etc.

De même que l’imagination avait transformé les Yazatas perses en anges hébreux et leur avait donné un cachet judaïque, ainsi elle s’empara des daévas ou mauvais génies de la religion persane et les acclimata dans le judaïsme. Satan n’est que la copie d’Angro-Mainyous, le dieu persan du mal absolu. Sans doute on ne l’érigea pas en rival de Dieu : la notion de Dieu était trop haute dans le judaïsme pour le permettre. Lui, le Très-Saint, le Très-Haut, le Tout-Puissant, pouvait-il être gêné par un être qui n’était lui-même que sa créature ? et cette créature était-elle de taille à traverser ses desseins ? Cependant le premier pas était fait ; Satan vit peu à peu grandir sa puissance au niveau de son modèle iranien, il eut son domaine distinct, celui des ténèbres, où il règne et triomphe au détriment du bien. Une fois créé à l’image d’Angro-Mainyous, Satan devait avoir, lui aussi, son armée de démons, de mauvais génies (schédim, mazikim, malakhe chabalah). Quelques-uns d’entre eux furent inventés de toutes pièces, non sans rappeler certains noms de daévas iraniens : tels sont les démons Asmodée et Samaël, chefs d’une légion d’esprits malfaisants. On imagina aussi un ange de la Mort (malakh hamaweth), ennemi de la vie de l’homme et chargé de la lui ravir.

Ces êtres de fantaisie s’emparèrent aussitôt de toute l’existence judaïque et donnèrent lieu à des usages qui ont une affinité évidente avec le magisme. Pendant le sommeil, croyait-on, un esprit impur s’abattait sur les mains ; d’où l’obligation de se laver les mains chaque matin au sortir du lit, et pareillement après la satisfaction d’un besoin naturel. La pollution nocturne passa, comme chez les Iraniens, pour une très grave souillure, parce qu’on l’attribuait à l’influence d’un démon malfaisant. Enfin, les lois relatives à la purification furent notablement aggravées, — toujours à l’instar des rites iraniens.

La doctrine judaïque de la rémunération se développa également d’une manière nouvelle sous l’influence des idées persanes. La doctrine persane divisait l’univers en deux grands domaines, celui de la lumière et celui des ténèbres ; elle plaçait les purs, les sectateurs d’Ahoura-Mazda, dans l’empire de la lumière, dans