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CHAPITRE IV


SIMÉON LE JUSTE ET SES DESCENDANTS
(300-187)


Depuis un siècle et plus, — depuis la mort de Néhémie, — le peuple juif offrait, à l’intérieur, l’image d’une larve qui file sa coque et en tire lentement le tissu de sa propre substance ; à l’extérieur, celle d’un souffre-douleur eu butte aux mépris et aux humiliations, et les subissant en silence. Il n’avait encore produit aucune individualité assez puissante pour le transformer en lui imposant sa pensée propre, aucun personnage assez influent pour lui imprimer une action énergique et féconde. C’est toujours du dehors, c’est des hommes éminents de la Babylonie ou de la Perse que lui vint l’impulsion, le signal du progrès. Mais sa nouvelle situation politique le séparait des frères qui vivaient dans ces pays-là. Entre les Judéens de l’Euphrate ou du Tigre et ceux de la mère patrie, ne pouvaient plus subsister ces actives relations d’autrefois. En effet, les maisons régnantes, la dynastie des Séleucides et celle des Ptolémées, se regardaient mutuellement avec défiance, et de fréquentes visites des Judéens de la Syrie à Jérusalem auraient été vues de mauvais œil à Alexandrie. Si le peuple de Palestine n’eût trouvé chez lui-même le ressort nécessaire pour se relever, il était perdu ou, ce qui revient au même, annihilé ; car un peuple qui, pour se conserver ou s’agrandir, a besoin du secours d’autrui, est condamné à la décadence et à l’effacement. Mais le peuple juif ne devait pas périr, et il vit surgir au bon moment l’homme qu’il lui fallait, l’homme qui, par son intelligence et son énergie, devait sauver son peuple de la ruine imminente.

Cet homme était Siméon le Juste, fils d’Onias Ier, qui florissait