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et très dangereux : il était chargé, aux jeux du cirque, d’abattre les animaux qui menaçaient la sécurité des spectateurs ; ce fut probablement sous la pression d’une poignante nécessité qu’il accepta un tel emploi. Les documents parlent souvent de sa force physique, mais ils vantent surtout son austère probité. Il évitait la société de ceux dont l’honnêteté pouvait être suspectée. Aussi les personnes qu’il honorait de son amitié jouissaient-elles de l’estime et de la confiance générales. Jamais un sourire n’éclairait son visage sévère ; il considérait la joie comme un signe de légèreté depuis que le peuple saint était sous la domination des païens. On a vu, plus haut, combien il avait le parler franc même envers le patriarche. Dans l’enseignement, il était partisan de l’examen approfondi du texte plus encore que son collègue et beau-frère Johanan. « Quand il discutait des questions de casuistique, il semblait broyer des montagnes l’une contre l’autre. » Ses vues sur différents points de l’Aggada étaient originales et furent adoptées par ses successeurs. Les écoles avaient discuté à maintes reprises sur le livre de Job et sur l’époque à laquelle le héros de ce drame a vécu, et les opinions étaient naturellement très partagées. Resch Lakisch donna certainement la solution juste du problème en déclarant que Job n’a vécu en aucun temps et n’a jamais existé, mais que c’est une simple fiction. Selon lui, les noms d’anges n’étaient pas d’origine juive, mais formaient un élément étranger au judaïsme et avaient été importés de la Babylonie. Un grand nombre de docteurs glorifiaient le passé au détriment du présent ; ils déclaraient, dans leur langage hyperbolique, qu’un ongle des anciens valait plus que le corps tout entier de leurs successeurs, ou que si les anciens étaient des anges, nous ne sommes plus que des ânes. Resch Lakisch, au contraire, affirmait que les hommes de son temps avaient plus de mérite que les anciens, parce que, malgré leur douloureuse situation, ils se consacraient à l’étude de la Loi. Quoique Ben Lakisch fut condisciple et ami de Johanan et devint plus tard son beau-frère, leurs relations se tendirent vers la fin de leur vie.

Josua ben Lévi était, avec Johanan et Ben Lakisch, le troisième chef de la jeune génération des Amoraïm palestiniens. L’histoire sait peu de chose de ce docteur, mais la légende rapporte sur lui