Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 3.djvu/273

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

enfreignaient les prescriptions que l’Église avait édictées contre eux. Le pape Gelasius avait pour ami un Juif de Télésine, qualifié de clarissime, dont il recommanda chaleureusement un parent à l’évêque Secundinus. Ce même pape acquitta un Juif, Basile, qu’on avait accusé d’avoir acheté des esclaves chrétiens de la Gaule, et qui allégua pour sa justification qu’il achetait seulement des esclaves païens, mais qu’il pouvait arriver qu’il se trouvât parmi eux des chrétiens.

Telle était la situation des Juifs en Italie au moment où ce pays tomba au pouvoir de Théodoric, chef des Ostrogoths. Sous le règne de ce prince, il se produisit quelques troubles contre les Juifs ; mais ces attaques étaient plutôt dues à l’animosité excitée par les croyances ariennes de Théodoric qu’à la haine des Juifs. Ces derniers n’avaient cependant pas trop à se louer de Théodoric, qui désirait vivement les convertir. Un jour, sur son ordre, son ministre et conseiller Cassiodore écrivit à la communauté juive de Milan ce qui suit : « Tu cherches, ô Judée, le repos sur cette terre, et, dans ton aveuglement, tu ne te préoccupes pas de t’assurer le repos dans l’éternité ! » Et quand les Juifs de Gênes lui demandèrent l’autorisation de restaurer leur synagogue, il leur donna cette réponse : « Vous recherchez ce qu’au contraire vous devriez fuir ! Nous vous accordons la permission que vous nous demandez, mais nous blâmons le vœu que vous avez formé dans votre folie. Néanmoins, nous ne voulons imposer à personne notre religion ni contraindre les hérétiques d’agir contre leur conscience. » Théodoric défendit aux Juifs de construire de nouvelles synagogues ou d’embellir les anciennes, il leur permettait seulement de restaurer celles qui menaçaient ruine. Mais si Théodoric n’accorda aux Juifs qu’une liberté assez restreinte, du moins les protégea-t-il contre toute agression. Dans leur haine contre les ariens, les catholiques saisissaient toutes les occasions pour offenser le plus illustre représentant de l’arianisme, le chef des Ostrogoths. Lorsqu’un jour, quelques esclaves se soulevèrent à Rome contre leurs maîtres juifs, la foule, dans le but de manifester son hostilité pour Théodoric, incendia les synagogues, maltraita les Juifs et pilla leurs maisons. Informé de ces troubles, Théodoric en fit des reproches très vifs au sénat et le mit en