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charges municipales, privilège qui leur fut enlevé par le premier empereur chrétien ; deux ou trois familles seules continuèrent à en jouir. Les Juifs de Cologne avaient aussi le droit, qu’ils conservèrent jusque vers le milieu du moyen âge, de juger eux-mêmes leurs procès. Un chrétien, fut-il ecclésiastique, qui avait un différend avec un Juif, était obligé de comparaître devant un juge (évêque) juif.

Si l’histoire des Juifs de Byzance, d’Italie et de France ne présente le plus souvent qu’un intérêt particulier, celle des Juifs de la péninsule ibérique est, au contraire, d’un intérêt général. Les habitants juifs de cette heureuse contrée, qu’ils aimaient comme leur patrie, ont contribué à sa grandeur, pris part à tous les événements importants qui y sont survenus et se sont ainsi trouvés mêlés à son histoire. D’un autre côté, l’Espagne juive a exercé sur le judaïsme une influence presque aussi considérable que la Judée et la Babylonie, et la moindre localité de cette nouvelle patrie est devenue pour les Juifs une terre classique. Les noms de Cordoue, Grenade et Tolède sont aussi familiers aux Juifs que ceux de Jérusalem et de Tibériade, ils rappellent des souvenirs plus puissants que Nehardéa et Sora. Tari dans sa sève en Orient, le judaïsme recommença à fleurir en Espagne. Ce pays semble avoir été désigné par la Providence pour devenir pour les exilés un nouveau centre, vers lequel convergèrent toutes leurs forces intellectuelles. — Le premier établissement des Juifs en Espagne se perd dans la nuit des temps. Quelques Juifs y étaient déjà venus du temps de la République romaine, attirés par les ressources considérables qu’offrait le pays. Plus tard, sous Vespasien, Titus et Adrien, de nombreux prisonniers de guerre juifs furent disséminés par les vainqueurs jusque dans les contrées les plus éloignées de l’Occident, et, d’après une version évidemment exagérée, 80 000 captifs auraient été envoyés en Espagne. Ils trouvèrent dans cette centrée des frères libres qui leur vinrent certainement en aide et remplirent envers eux l’obligation prescrite par le Talmud de racheter les esclaves.

À en juger par les noms de quelques villes de l’Espagne, les Juifs ont dû être fort nombreux dans certaines parties de ce pays. Ainsi, Grenade s’appelait la ville des Juifs, parce que toute sa