Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 3.djvu/39

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base solide à la tradition, il y porta également l’ordre et la lumière, et c’est grâce à lui qu’il allait devenir possible d’arrêter le développement et de réunir les matériaux si abondants de la loi orale. Jusque-là les halakot avaient été enseignées au hasard, sans que rien les reliât les unes aux autres ; il était nécessaire, pour retenir ces innombrables prescriptions, de suivre assidûment pendant plusieurs années les conférences des docteurs, de travailler avec ardeur et d’être doué d’une bonne mémoire. Akiba, pour venir en aide à la mémoire et faciliter l’étude de ces lois, les coordonna et les classa par groupes et d’après leur nombre. « Akiba, a-t-on dit, a fait en quelque sorte des anneaux ou des anses pour la Loi, il a rangé et mis en ordre les prescriptions comme un trésorier met en ordre ses comptes. » L’ensemble de ces halakot fut nommé Mischna (Matnita) et, plus tard, pour le distinguer du recueil postérieur, Mischna de Rabbi Akiba. Ces halakot ainsi coordonnées ne furent pas mises par écrit, elles restèrent orales. À vrai dire Akiba n’avait fait que classer et enseigner méthodiquement les halakot. Il avait été aidé dans ce travail de coordination, trop considérable pour un seul homme, par ses disciples, qui, pénétrés de sa méthode, purent achever son œuvre. Lorsque, plus tard, on réunit définitivement toutes les lois traditionnelles, l’œuvre d’Akiba et de ses disciples servit de base au nouveau recueil.

La méthode si originale d’Akiba qui se distinguait par la perspicacité pénétrante avec laquelle elle examinait le texte même et par ses efforts à mettre de l’ordre dans les matériaux recueillis, triompha peu à peu de l’opposition qui lui avait été faite de deux côtés différents, acquit une autorité considérable et fit tomber les systèmes précédents dans un complet oubli. Des docteurs ne craignirent pas d’avouer que de nombreuses questions étaient restées obscures jusqu’au moment où Akiba les avait élucidées. La renommée du restaurateur de l’enseignement oral s’étendit dans les communautés judaïques les plus lointaines ; son origine obscure et l’humble situation qu’il avait occupée dans ses premières années ajoutèrent encore à l’éclat de sa réputation. La jeunesse studieuse préférait un enseignement qui aiguisait l’esprit et développait la raison à la méthode aride et stérile qui ne faisait appel qu’à la mémoire, et elle se pressait en foule autour d’Akiba. La légende