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produire de schisme dans le judaïsme. On n’était plus frappé que de la dureté de cette disposition qui permettait d’excommunier des collègues et de leur interdire l’accès de l’école. Josua contribua sans doute pour une grande part à l’établissement de cette mesure.

Les bons rapports entre Adrien et la nation judaïque ne subsistèrent pas pendant plus de dix ans ; ils n’avaient eu, du reste, aucune chance de durée. L’empereur ne pouvait oublier qu’il avait été obligé de faire des concessions à ces Judéens méprisés, et ceux-ci ne pouvaient pardonner à Adrien d’avoir violé sa promesse et trahi leurs plus chères espérances. Cette aversion mutuelle se manifesta lorsque Adrien visita ou traversa la Judée. Le vaniteux empereur, pour acquérir le droit d’être appelé le père de la patrie, et peut-être aussi par désœuvrement et sous l’impulsion d’une sorte d’agitation intérieure qui l’obligeait à être sans cesse en mouvement, avait visité presque toutes les provinces de l’immense empire romain. Il avait voulu tout voir de ses yeux, s’était informé de tout avec une curiosité puérile, et s’était entretenu avec des sages et des hommes intelligents de tous les pays. C’était un bel esprit qui avait la prétention de se croire profond philosophe et plus instruit en toutes choses que les autres hommes. Il est douteux qu’Adrien se soit rendu un compte exact des dispositions des provinces ; en tout cas, il se méprit entièrement sur les sentiments des Judéens. Lors de son voyage en Judée (été 130), il reçut les hommages obséquieux de tous ceux qui haïssaient le peuple autochtone, les vrais Judéens. Il vit venir au devant de lui, bas et rampants, pour le saluer, comme un demi-dieu et même comme un dieu, les Romains, les Grecs abâtardis, peut-être aussi les Samaritains et les chrétiens. Un dialogue mimique qui eut lieu en sa présence entre un chrétien et Josua ben Hanania jette un certain jour sur l’attitude que les deux religions tenaient l’une vis à vis de l’autre. Le chrétien montra par ses mouvements que Dieu avait détourné sa face d’Israël ; Josua répondit par un geste que l’Éternel continuait à couvrir son peuple de son bras protecteur. Adrien se fit expliquer cette pantomime. L’empereur paraît, du reste, s’être entretenu à plusieurs reprises avec Josua ; la tradition rapporte quelques-uns de ces entretiens, dont le suivant présente un certain caractère d’authenticité. Adrien dit un