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CHAPITRE III


LES CINQ ISAAC ET YITSHAKI
(1070-1096)


Troublés un instant dans leur sécurité par les désordres de grenade, les Juifs d’Espagne se remirent rapidement de cette alerte. Cette persécution fut, du reste, un fait isolé. Les rois et les émirs des autres parties de l’Espagne continuaient à appeler à leur cour des Juifs habiles et intelligents, à leur confier la direction des affaires et à laisser à la population juive les mêmes droits qu’à leurs autres sujets. À l’exemple des princes musulmans, les rois chrétiens nommaient également des Juifs aux fonctions publiques et utilisaient leur intelligence, leur activité et leur dévouement. Les Juifs ne perdirent donc rien de leur influence, au début, par suite de l’affaiblissement progressif des États musulmans et de la prépondérance de plus en plus grande de l’élément chrétien. À l’ombre de la croix comme sous la domination du croissant, ils pouvaient se livrer librement à la culture des sciences et de la poésie. Il est à remarquer, néanmoins, qu’après la mort de Samuel ibn Nagrela et d’Ibn Gabirol, la poésie, l’exégèse, la linguistique et la philosophie, tout en ayant de zélés partisans, durent céder le pas à l’étude du Talmud. C’est surtout la partie dialectique du Talmud qui fut remise en honneur et cultivée de nouveau avec ardeur en Espagne, en Afrique et en France.

Des six principaux maîtres qui dirigèrent le mouvement talmudique pendant la seconde période rabbinique, cinq s’appelaient Isaac et le sixième se nommait Yitshaki. C’étaient Isaac ibn Albalia, investi également de fonctions politiques, Isaac ibn Giat et Isaac ben Reuben, tous deux pontes liturgiques en même temps que talmudistes, Isaac ibn Saknaï, moins remarquable que les précédents,