Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 5.djvu/165

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leur aide à briser la résistance des dissidents. Comme les Juifs, par leurs capitaux, leur activité et leur esprit d’ordre, exerçaient une sérieuse influence sur la noblesse, les Jésuites s’efforcèrent de détruire cette influence et de faire restreindre leur liberté en s’alliant à leurs ennemis, les corporations d’artisans et de marchands allemands.

Pourtant, pendant la guerre de Trente ans, leur situation fut encore plus satisfaisante que celle de leurs coreligionnaires d’Allemagne, et bien des Juifs, chassés par la guerre, vinrent se réfugier de ce pays en Pologne. Le roi Ladislas VII (1632-1648) les traita avec bienveillance, et la noblesse polonaise, imprévoyante, dépensière, amie du faste, avait besoin d’eux, parce qu’ils étaient industrieux, actifs, économes. Elle les employait surtout pour l’administration des colonies nouvellement fondées près du bas Dniéper et sur la rive septentrionale de la mer Noire, dans le voisinage des Tartares de la Crimée. Les membres de ces colonies, serfs échappés, forçats, paysans, aventuriers de toute sorte, formèrent les premiers éléments de la tribu des Cosaques appelés Zaporogues. Obligés, au commencement, de vivre de pillage et de rapines, ils devinrent d’excellents guerriers. Comme les rois les employaient souvent contre les incursions des Tartares et des Turcs, ils leur accordèrent une certaine autonomie dans l’Ukraine et la Petite Russie et placèrent à leur tête un attaman (hetman).

La plupart de ces Cosaques étaient sectateurs du rite grec. Entraînés par leur ardeur de prosélytisme, les Jésuites résolurent de les rattacher à l’Église romaine ou de les exterminer. Pour atteindre leur but, ils eurent recours à tout un système de vexations et d’oppression. Presque toutes les colonies de l’Ukraine et de la Petite Russie appartenaient alors à trois familles nobles : les Koniecpolski, les Wischniowiecki et les Potocki. Ces familles avaient confié à des fermiers juifs la charge de faire rentrer les impôts. Pour chaque nouveau-né, pour chaque mariage, les Cosaques étaient tenus de payer une taxe. Afin d’empêcher toute fraude, les fermiers juifs détenaient les clefs des églises grecques, de sorte que le prêtre ne pouvait procéder ni à un baptême ni à un mariage sans leur autorisation. Celle-ci n’était naturellement