Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 5.djvu/171

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

La paix conclue, Chmielnicki n’attendit qu’une occasion pour recommencer la lutte. Dès que son autorité, ébranlée par ses derniers échecs, fut de nouveau consolidée et qu’il eut comblé les vides faits dans son armée, il reprit les hostilités. Ne pouvant plus compter sur le concours des Tartares, il entraîna les Russes dans sa guerre contre la Pologne. Par suite de l’entrée en campagne des Russes (1654-1655), les communautés juives établies dans l’ouest de la Pologne et dans la Lithuanie, que les Cosaques avaient ménagées jusque-là, furent également atteintes par le fléau. Les Juifs de Vilna disparurent tous, par les massacres ou la fuite. Quand, l’année suivante (1656), les Suédois, sous la conduite du roi Charles X, se joignirent aux autres ennemis de la Pologne, de nouvelles régions furent envahies et, par conséquent, de nouvelles communautés juives, de Posen à Cracovie, eurent à endurer les plus grandes souffrances. Pillés, maltraités, tués par les diverses armées ennemies, Cosaques, Russes, Suédois, les Juifs ne furent même pas toujours épargnés par les Polonais. Le général Czarnicki les laissa massacrer par ses soldats, sous prétexte qu’ils avaient des accointances avec les Suédois. Seul le prince-électeur de Brandebourg les traita avec équité. En ces dix années de guerre (1648-1658), plus de trois cents communautés furent détruites en Pologne et plus de 250.000 Juifs tués. Ceux qui restaient étaient appauvris et découragés, accomplissant les travaux les plus durs et les plus humiliants pour ne pas mourir de faim.

On revit à cette époque le lamentable spectacle qu’avaient présenté les Juifs expulsés de l’Espagne et du Portugal. Partout on rencontrait des Juifs polonais, à l’aspect hâve et décharné, qui erraient à la recherche d’un asile. À l’ouest, à travers la région de la Vistule, beaucoup de ces fugitifs arrivèrent à Hambourg, émigrèrent à Amsterdam ou furent expédiés à Francfort-sur-le-Mein et dans d’autres villes rhénanes. Du côté du sud, ils allèrent se réfugier dans la Moravie, la Bohème, l’Autriche, la Hongrie et jusqu’en Italie. Ceux que les Tartares avaient faits prisonniers furent emmenés dans les provinces turques et envoyés en partie dans les États barbaresques. Dans toutes les villes, ils trouvèrent un accueil cordial auprès de leurs coreligionnaires,