Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 5.djvu/205

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de fréquentes relations avec le prédicateur hambourgeois Esdras Edzardus, qui manifestait un zèle excessif pour la conversion des Juifs et répandit le bruit, assurément faux, que peu de temps avant sa mort, de Lara se serait rapproché du christianisme. Dionys ou Benjamin Moussefia, médecin et naturaliste, fut au service de Christian IV, roi de Danemark, jusqu’à la mort de ce souverain. Quoiqu’il eût étudié la philosophie et ne craignit pas de faire ses réserves au sujet de certains passages de la Bible et du Talmud, il n’en remplit pas moins, à un âge avancé, les fonctions de rabbin à Amsterdam.

Balthazar Orobio de Castro (né vers 1620 et mort en 1687) était bien supérieur à la plupart des poètes et des savants dont il vient d’être fait mention. Originaire d’une famille marrane qui observait secrètement le jeune du jour de l’Expiation, il fut habitué à pratiquer à la fois le christianisme et le judaïsme. Doué d’un esprit net et précis, il étudia la vieille philosophie, telle qu’elle était encore enseignée dans les écoles espagnoles, et fut nommé professeur de métaphysique à l’université de Salamanque. À l’âge mûr, il s’occupa de médecine et acquit à Séville la réputation d’un habile praticien ; il devint le médecin d’un duc de Medina-Celi et d’une autre famille noble très influente. Tout à coup sa sincérité de croyant chrétien devint suspecte à l’Inquisition. Il fut incarcéré sous l’inculpation de judaïser et resta enfermé pendant trois ans dans un sombre cachot.

Au commencement de sa détention, il occupa son esprit à résoudre des subtilités philosophiques. Mais peu à peu il s’assombrit, se découragea, se demandant s’il était vraiment ce Don Balthazar Orobio qui se promenait dans les rues de Séville et jouissait d’une lacée aisance au milieu de sa famille. Il n’était pourtant pas encore au bout de ses souffrances. Un beau jour, l’Inquisition le fit sortir de prison pour le soumettre à la torture et essaya de lui arracher l’aveu qu’il observait réellement le judaïsme. Il supporta vaillamment les plus atroces supplices, fut ramené en prison et finalement condamné à porter pendant deux ans le san-benito et à quitter ensuite l’Espagne. Il se rendit à Toulouse, où il fut nommé professeur à l’école de médecine. Mais, ne pouvant se résoudre à dissimuler plus longtemps ses véritables croyances,