Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 5.djvu/227

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

pape, on tenta de briser le pouvoir de l’Inquisition. À la tête de cette opposition se trouvait un père Jésuite, Antonio Vieira, très habile et très fin, qui témoignait une prédilection marquée aux Juifs et aux Marranes. Pendant son séjour à Amsterdam, il assistait aux sermons des prédicateurs juifs et entretenait des relations amicales avec Manassé ben Israël et Aboab. L’Inquisition le condamna à rester enfermé dans une maison professe et le priva du droit de roter et de prêcher. Une fois remis en liberté, Vieira songea à se venger du Saint-Office ; il trouva des auxiliaires actifs et intelligents dans les membres de son ordre. Pour saper l’influence du Saint-Office auprès du pape, il se rendit à Rome. D’autre part, le provincial des Jésuites à Malabar, Balthazar, vint soumettre au régent du Portugal, Dom Pedro, un plan pour reconquérir les Indes et dont la réussite, selon lui, dépendait du concours des capitaux marranes. La conclusion était qu’il fallait ménager des gens qui pouvaient devenir si utiles.

Pendant que les Jésuites intriguaient secrètement contre le Saint-Office, les émissaires de l’Inquisition avaient surexcité la foule contre les Marranes, qu’ils accusaient d’avoir volé des hosties. Afin de mettre fin à cette agitation incessante, plusieurs membres du conseil d’État proposèrent d’expulser les Marranes du pays. C’était là un moyen trop radical, qui aurait rendu dorénavant inutiles les services des inquisiteurs. Aussi s’empressèrent-ils de combattre cette proposition. Par une singulière ironie, eux, les implacables pourvoyeurs des prisons et des bûchers, ils invoquèrent la loi d’amour enseignée par leur religion pour qu’on ne punit pas les innocents avec les coupables en chassant tous les Marranes du Portugal.

Cependant, à Rome, les efforts d’Antonio Vieira et de l’ordre des Jésuites contre l’Inquisition furent couronnés de succès. Le pape Clément X, par un bref du 3 octobre 1674, suspendit l’action des tribunaux d’inquisition en Portugal, leur défendit de prononcer la peine de mort ou des galères ou de la confiscation des biens contre les Marranes et leur enjoignit de soumettre à l’office général de l’Inquisition à Rome tous les procès en cours contre des Marranes incarcérés. En même temps il autorisa les a nouveaux chrétiens b à envoyer des délégués à Rome pour exposer