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leur religion. Après avoir écrit un livre à la gloire du catholicisme, il professa la doctrine des Sociniens et des Mennonites et, à la fin, se convertit au judaïsme, à Amsterdam, sous le nom de Moïse Germanus (décédé le 17 avril 1702). Il ne voulait plus rester chrétien, disait-il, afin de dégager sa responsabilité des calomnies odieuses que ses coreligionnaires répandaient contre les Juifs. Encore aujourd’hui, ajouta-t-il, en Pologne et en Allemagne on raconte tous les détails d’un meurtre que des Juifs auraient commis sur un enfant chrétien, dont ils auraient ensuite envoyé le sang à tous leurs coreligionnaires dans des tuyaux de plume. C’est là une calomnie abominable. D’autres catholiques encore n’hésitèrent pas, en ce temps, à se soumettre à la douloureuse opération de la circoncision et à s’exposer aux injures pour embrasser le judaïsme.

La littérature hébraïque aussi conquit aux Juifs de précieuses sympathies. Les savants chrétiens, de plus en plus familiarisés avec l’hébreu et la langue rabbinique, reportaient sur le peuple juif une partie de l’admiration que leur inspiraient les œuvres remarquables de ses prophètes et de ses penseurs. Bien plus qu’au commencement du siècle, la Bible et les ouvrages talmudiques étaient alors étudiés, traduits, commentés dans les milieux chrétiens. C’était devenu presque une obligation pour la plupart des théologiens catholiques et protestants d’avoir des notions de la littérature rabbinique, quoiqu’on essayât de décourager les hébraïsants en les appelant dédaigneusement demi rabbins. Un écrivain chrétien de ce temps, Jean-Georges Wachter, scandalisé de ce zèle pour les œuvres juives, disait avec mélancolie : Je souhaite que ceux qui se prétendent chrétiens cessent de manifester un enthousiasme de prosélyte pour la foi juive, au grand dommage de leur propre religion. Car, de nos jours, il est devenu de mode de chercher l’origine de toute chose dans le judaïsme.

Des différents savants qui, à cette époque, se consacrèrent à l’étude de la Bible, le plus remarquable était, sana contredit, Richard Simon, de la congrégation des Oratoriens de Paris. Esprit sagace et profond, il fut le fondateur de l’exégèse scientifique de l’Ancien et du Nouveau Testament. Ce furent les observations critiques