Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 5.djvu/250

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Néhémia Hiyya Hayon (né vers 1650 et mort après 1726). Parmi les mystificateurs si nombreux du XVIIIe siècle, il fut peut-être le plus rusé, le plus hypocrite et le plus audacieux. Il mena une vie d’aventures et de plaisirs, ne craignant jamais d’user de moyens malhonnêtes pour atteindre son but. Après avoir échoué dans bien des entreprises, il se décida à tenter la fortune à l’aide d’extravagances cabalistiques. Il composa un ouvrage pour démontrer que le judaïsme, tel qu’il était enseigné par la Cabale, reconnaissait un Dieu triple. Avec cet écrit pour tout bagage, il se mit en route. À Smyrne (printemps de 1708), il parvint à duper quelques gens riches, qui lui promirent de le soutenir et de l’aider à imprimer son ouvrage sur le Dieu triple dans quelque ville de la Palestine. II partit alors pour Jérusalem. Il n’avait pas encore débarqué que le collège rabbinique de Jérusalem, averti de ses intentions et avisé du caractère hérétique de son ouvrage, le mit en interdit et. condamna son livre au feu (juin 1708).

Pour vitre, Hayon fut de nouveau réduit à mendier. Il quitta la Palestine, et, après bien des pérégrinations, arriva en Italie. Mais là, ses prédications ne trouvèrent pas d’écho. Il avait déjà séjourné précédemment en Italie et y avait produit une impression, peu favorable. Du reste, un cabaliste de Livourne, Joseph Ergas, avait reconnu l’esprit sabbathien dans l’ouvrage que Hayon lui avait soumis et l’avait déclaré dangereux pour les croyances juives. À Venise, Hayon reçut un meilleur accueil des rabbins et des laïques. Il rit imprimer dans cette ville un opuscule où il déclarait explicitement que le judaïsme acceptait le dogme de la Trinité, non pas la Trinité chrétienne, mais celle qu’avait enseignée Sabbataï. Comme par une sorte de gageure, il mit dans cet écrit les premiers vers d’une chanson obscène répandue en Italie sous le nom de : La belle Marguerite. Chose bizarre, le rabbinat de Venise approuva et recommanda cet opuscule, probablement parce qu’il n’en avait pas pris connaissance ou qu’il n’en comprenait pas la portée.

De Venise, Hayon se rendit à Prague, où il fut bient8t entouré d’un groupe important de partisans. Il eut même parmi ses admirateurs le célèbre talmudiste Jonathan Eibeschütz. À Prague aussi, Hayon mena une existence de libertin. Pour se procurer