Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 5.djvu/364

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nul Juif n’habitait auparavant, ni de transporter leur domicile d’une province à l’autre. On cherchait surtout à les rendre méprisables aux yeux des autres croyants. Pendant qu’à un certain moment on avait évité, dans les actes officiels, d’employer l’épithète de juif, les administrations affectaient, au contraire, de s’en servir de nouveau à toute occasion.

Un fait de ce temps marque bien la malveillance de la Prusse pour les Juifs. Le décret inique du 17 mars 1808, par lequel napoléon Ier avait apporté les plus graves restrictions à la liberté commerciale et au droit de domicile des Juifs de l’Alsace et des départements rhénans, devait devenir caduc au bout de dix ans en cas où il ne serait pas renouvelé. En France, le gouvernement de Louis XVIII, quoique réactionnaire et clérical, n’essaya même pas, après ces dix ans, de faire maintenir ce décret, et les Juifs d’Alsace recouvrèrent tous leurs droits. Mais dans les provinces rhénanes, où la Prusse avait laissé en vigueur ce décret quand elle les eut reconquises sur la France, il devait continuer à être appliqué, en vertu d’un ordre du cabinet du 3 mars 1818, jusqu’à un temps indéterminé.

À ce moment, les esprits étaient surexcités en Allemagne à la suite du meurtre de Kotzebue (mars 1819) par un jeune fanatique, l’étudiant Charles Sand, à cause des mesures rigoureuses prises par les différents États contre les excès démagogiques et la teutomanie, qu’au début ils avaient, du reste, encouragés eux-mêmes. Déçus dans leurs espérances de liberté, les teutomanes étaient irrités de l’échec qu’avaient subi leurs efforts, et, comme ils se sentaient impuissants contre le gouvernement, ils s’en prirent aux Juifs. On assista alors, pendant plusieurs mois, à une série d’excès et de violences qui rappelèrent les pires jours du moyen age.

Les désordres commencèrent à Wurtzbourg, au cri de Hep ! Hep ! [1] La populace se rua sur les maisons des Juifs, pillant les magasins, jetant les marchandises par les fenêtres. 5a fureur augmenta devant la résistance des Juifs, qui se défendirent vigoureusement. Ce fut alors, dans les rues, une véritable bataille