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CHAPITRE XVIII


Orthodoxes et réformateurs en Allemagne. Situation des Juifs d’Europe
(1840-1880)


Munk aurait voulu que l’affaire de Damas servit d’avertissement aux Juifs d’Europe et les convainquit de la nécessité de maintenir entre eux une union étroite, pour se défendre plus efficacement contre tes dangers ultérieurs. Son conseil ne fut pas suivi, du moins en Allemagne. Dans ce pays, en effet, la lutte recommença à cette époque avec plus d’âpreté entre les orthodoxes et les novateurs. Le parti de la réforme, à Hambourg, avait fait des progrès considérables ; la jeune génération préférait, en général, le culte digne et imposant du nouveau temple aux offices bruyants des anciennes synagogues. Le temple des novateurs était devenu trop petit et on se préoccupait d’en élever un plus grand. Pour empêcher leurs adversaires de réaliser leur projet, les orthodoxes allèrent porter plainte contre leurs innovations auprès du Sénat de la ville. Les querelles des deux partis prirent surtout un caractère de grande vivacité à l’occasion du nouveau Recueil de prières que publièrent les novateurs. Pourtant, dans un louable sentiment de conciliation, ceux-ci avaient supprimé, dans ce Rituel, tout ce qui, dans l’ancienne édition, avait particulièrement froissé les orthodoxes. Mais, par contre, ils l’avaient intitulé « Prières pour les Israélites », comme s’il était destiné à tous les Juifs, sans distinction. Cette prétention irrita les partisans de la tradition. Bernays fit annoncer dans trois synagogues (16 octobre 1841) qu’il était interdit à tout Israélite, sous peine d’excommunication, de faire usage de ce Rituel. Cette défense, rédigée en termes offensants pour les auteurs de ce Recueil de prières, provoqua de la part des réformateurs une violente réplique.