Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 5.djvu/425

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Grâce à ses travaux scientifiques et à son esprit critique, il s’était rendu compte que, loin de l’affaiblir, certaines réformes rendraient, au contraire, une nouvelle vigueur au culte juif. D’opinion modérée, il était l’homme du juste milieu, aussi éloigné des exagérations et des fantaisies de Geiger et de Holdheim que de l’orthodoxie étroite et obstinée de Hirsch. Ses collègues du synode l’estimaient beaucoup comme rabbin et comme savant, et, au début, son autorité contrebalança l’influence du parti de la réforme de Berlin.

Frankel ne siégea pourtant pas longtemps au synode. Il s’en retira bruyamment quand la majorité eut voté la résolution qu’il était nécessaire de faire oublier aux Juifs la langue hébraïque. De tous côtés on approuva Frankel pour sa décision, et ces manifestations prouvèrent que le synode de Francfort ne représentait qu’une faible minorité. Frankel parti, l’assemblée des rabbins se trouva sous la domination du groupe berlinois. Elle n’osa pourtant pas approuver sans réserve les idées trop avancées de ce parti, de crainte de mécontenter la plupart des communautés allemandes. Elle tourna la difficulté en faisant cette déclaration ambiguë qu’elle était disposée à soutenir de toutes ses forces les tentatives du parti de la réforme, si ce parti s’inspire des principes qui doivent présider à toute modification sérieuse introduite dans le judaïsme.

Sans se laisser arrêter par cette sorte de fin de non-recevoir, les novateurs de Berlin continuèrent leur propagande et réussirent à organiser une communauté de près de deux cents membres. Holdheim la déclara définitivement fondée le 2 avril 1846. Elle eut son temple, son prédicateur et son culte spécial, avec des innovations qu’on n’avait encore établies dans aucun des autres temples réformés. Dans l’Église judéo-allemande, on priait, en effet, la tête découverte, et on faisait très peu usage de la langue hébraïque ; toutes les prières se récitaient en allemand. En général, le culte de ce temple réformé avait plutôt un cachet étroitement allemand que juif. Véritable fanatique à rebours, Holdheim s’efforçait de faire disparaître tout ce qui pouvait rappeler l’ancien judaïsme, supprimant non seulement les usages d’origine talmudique ou rabbinique, mais aussi les obligations prescrites