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SOUFISME - SOUFRE

il

avec Dieu. Celle union spirituelle, tout, le monde peut la solliciter avec ferveur, mais tous ne l’obtiennent point, car elle est un produit de la grâce de Dieu « Fadhl-ullah ou Fayazân-ullah ». Le soûfi, pendant son séjour dans le corps, est uniquement occupé à méditer sur l’unité de Dieu ( Wahddniya) , la réminiscence des noms de Dieu (zikr) et l’avancement progressif dans le tarika ou voyage delà vie, jusqu’à l’unification avec Dieu.

Qu’est ce que le voyage soûfi ? La vie humaine est assimilée à un voyage (safar), et celui qui recherche Dieu à un voyageur (sdlik). Le but du voyageur est de chercher à atteindre la connaissance de Dieu (m’arif ’a), car l’existence humaine est une période de bannissement pour l’âme qui ne peut rentrer en Dieu qu’en passant par plusieurs étages successifs. L’état naturel de l’homme est appelé nasoùl (humanité) ; le disciple doit y observer la loi Csharia) et se conformer à tous les rites des croyants. Les autres étages (mandzil), sont : la nature des anges (malakoùt) où l’on atteint le cheminde la pureté, la possession du pouvoir(d/a- />/w/0, degré auquel correspond la connaissance (m’arifa), et enfin l’extinction (fend) ou absorption en la déité, degré auquel correspond la vérité (hakika). Le voyageur est soumis au renoncement, qui est de deux genres : externe et interne. Le premier est le renoncement aux richesses et aux honneurs mondains, le second est le renoncement aux désirs profanes. Mais il doit se garantir surtout de l’idolâtrie, qui est pour les uns l’adoration des satisfactions mondaines, pour les autres une pratique trop assidue des prières et du jeûne. Pour arriver à ce but, le voyageur a trois aides nécessaires : l’attraction (Indiidhah), acte de Dieu qui tire à lui l’homme pourvu déjà d’une tendance ou inclination ; la dévotion (ibâda), poursuite du voyage en deux chemins : vers Dieu et en Dieu, le premier limité, le second sans limite ; enfin l’élévation Çouroitdi). Mais le voyage ne peut être accompli seul, il faut un guide ou moniteur pris dans la deuxième classe Çibâda). Le croyant qui, après avoir été tdlib (homme instruit doutant de la réelle nature de Dieu) et mourid (désireux de poursuivre son enquête), est devenu sâlik (voyageur), se place sous l’autorité spirituelle d’un guide soûfi qui lui fait servir Dieu Çoubûûdiya) jusqu’à ce que l’influence divine lui fasse atteindre l’étage ’ichk (amour). L’amour divin, enlevant tout désir mondain de son cœur, le fait arriver au xouhd (isolement) ; il mène alors une vie contemplative, passe par le degré(m’an/a), et attend l’illumination directe wadjd (extase). Après avoir reçu une révélation de la vraie nature de Dieu (étage hakika), il arrive à l’étage wasl (union avec Dieu). Il ne peut aller plus loin ; c’est seulement à sa mort qu’il arrivera au degré fend (absorption en la divinité). Les zikr ne sont que des formes variées de dévotion inventées par les guides soûfis pour développer la vie spirituelle. La conduite du disciple en présence de ses maitres est déterminée par des règles qui diffèrent peu de celles imposées à tous les derviches (V. Derviche).

Quelques auteurs distinguent, dans le voyage soûfi, sept étages auxquels correspondent des degrés dans la sphère céleste, pour y recevoir l’âme après la mort. Mais alors les métaphysiciens protestent : l’âme ne peut retourner dans un lieu déterminé puisqu’elle ne vient pas d’un lieu déterminé. L’intelligence céleste, à laquelle correspond le degré d’intelligence atteint par l’homme, absorbera son âme après sa séparation du corps. Les soûfis attribuent une haute antiquité à leurs doctrines. Ils n’hésitent pas à les faire remonter jusqu’à Abraham ; ils prétendent qu’un des fondateurs de leur secte était le propre gendre du prophète Ali, fils d’Abou-Tàlib ; enfin « ils vénèrent une femme pieuse de Jérusalem, du nom de Hàbia, dont les paroles rappellent la mystique chrétienne ». Le premier personnage qui porta le nom de soûfi fut Abou-Hàchim de Koûfa. Le premier couvent ou khanâkah fut fondé en Khorasân par le Persan Abou-Saîd, bien que’le prophète eût interdit la vie monacale dans l’Islam. Un autre couvent fut établi à Hamla ne Syrie ; Saladin en fonda un en Egypte. Le soufisme se divisa en deux écoles : le Persan Bestârai (875) inclina vers le panthéisme, Djonaid de Bagdad prêcha un système conciliable avec le dogmatique musulman. Un des plus célèbres docteurs de cette école fut Halladj, brûlé vif en 922. On disserta sur le soufisme sous les khalifes al-Motazz et al-Mohtadi, puis on le prêcha sous al Motaraid. Les principaux écrivains soûfis sont : Mohamed Salami an-Nichaboûri (1021), el-Kochaïrî (1072), Ghazàli (11 H), Sohrawerdi (1234), Ferid-ed-din Atthâr (1230),Djàmi (1482) et ech-Cha’ranî (1S65). Cette mystique douce et pleine de sentiment s’est exhalée dans des poésies, tantôt empreintes de tendresse et de résignation, tantôt débordantes de sensualité et d’ivresse. C’est dans ce genre que se sont illustrés les meilleurs poètes persans : Djelàl ed din Roûmi, auteur du Mesneivî ; Djàmi. auteur de Sdldman ou-Absâl ; Ferid ed-din Atthâr, auteur du Mantikout-tair : S’adi, llàfiz de Chiraz, Bayazid al-Bestàmi. Les poètes turcs se sont en grande partie inspirés de ces mystiques persans. Georges Salmon.

Bibl. :Dozy, Essaisur l’histoire de l’Islamisme ; Leyde, 1879. — Dugat, Histoire des philosophes et des ttuiologiens musulmans ; Paris, 1878. — Hughes, A dictionary of ïslam ; Londres, 1896. — Shahraslâni, éd. Cureton ; Londres, 1842 ; trad. allem. par Ilaarbriicker ; Halle, 1850.

— Cahra de Vaux, GhazâÙ. le Traité de la rénovation ; Paris, 1891.

SOUFRAGE. I. Viticulture (V. Vigne et Vin). IL Technologie (V. Blanchiment, t. Vf. p. 1030 et 1031).

SOUFRE. Minéralogie. — Le soufre joue, dans l’écorce terrestre, un rôle important, non pas tant par sa quantité absolue, qui est assez faible (environ 0,06 °/ de la masse totale d’après Vogt), que par son intervention comme minéralisateur dans la cristallisation de la plupart des minerais métalliques profonds. Beaucoup de roches, et spécialement de roches basiques anciennes, renferment du soufre sous forme de pyrite ou de pyrrhotine ; ces sulfures apparaissent immédiatement disséminés dans la pâte des diorites, diabases, mélaphyres, porphyrites, gabbros. etc.. quand on les examine au microscope : souvent même, ils se décèlent à l’oeil nu ; mais, en outre, il est très habituel de trouver, au voisinage des mêmes roches basiques, des concentrations pyriteuses plus ou moins étendues, parfois très volumineuses, dont on saurait difficilement nier la relation d’origine avec elles. Il est à remarquer, par contre, que les roches volcaniques tertiaires ou quaternaires sont, presque toujours, exemptes de pyrite en France. Ce rôle du soufre comme minéralisateur se retrouve dans la plupart des filons métallifères de plomb, zinc, fer, cuivre, etc., qui prennent, en général, une forme sulfurée quand on les observe en profondeur, dans leur état primitif, loin des actions superficielles par lesquelles ils ont pu être altérés plus haut ; il existe également dans nombre de sédiments métallifères (Mansfeld, Silésie, Saint -Avold. etc.), qui sont composés de sulfures de fer, cuivre ou plomb. Enfin l’examen des éruptions volcaniques actuelles montre que les laves dégagent toujours une quantité notable de soufre à l’état de" combinaisons diverses, et l’on a pu logiquement rapprocher ces fumerolles sulfureuses des phénomènes mal connus qui ont amené la dissolution de sulfures dans les eaux thermales, auxquelles on doit l’incrustation des filons. Le soufre, dans les parties profondes et inaltérées des gisements filoniens, est, on peut le dire, toujours en combinaison aveequelque métal, très souvent le fer. Dans les sédiments, il peut être à l’état de sulfure métallique, parfois aussi à l’état de sulfate (sulfates de chaux, de strontiane, de baryte, etc.). Enfin, près de la surface, l’altération a souvent réduit ces sels à base de soufre et produit la formation du soufre natif. Ce dernier est un accident local dans la plupart des mines ; il constitue, au contraire, à lui seul, des gisements énormes en certaines régions spéciales, comme la Sicile. Ainsi donc